J’ai pas mal de temps libre en ce moment, ce qui me laisse le temps de lire, et de regarder pas mal de drama et de films. J’ai profité de mon temps libre pour regarder un énorme classique du cinéma sud-coréen : Mademoiselle de Park Chan-Wook. Voici ce que j’en ai pensé 🙂
La Corée est occupée par les japonais. Dans le but de s’en mettre plein les poches, un escroc qui se fait appeler «le Comte Fujiwara» (Ha Jeong-Woo 하정우) implante une de ses espionnes, Sook-Hee (Kim Tae-Ri 김태리), au service de la jeune Hideko (Kim Min-Hee 김민희) afin de lui voler son héritage en la faisant interner.
Mademoiselle (아가씨 en Corée du Sud) est un film sorti en 2016, réalisé par Park Chan-Wook박찬욱, que vous connaissez sans doute pour Old Boy 올드보이 (2003). Suite à plusieurs coup dur après les sorties de Stoker en 2013 pour le public international, puis l’échec de Thirst en Corée, Park Chan-Wook jouait les funambules, ne sachant plus vers qui se tourner pour faire son cinéma. C’est finalement en adaptant un livre anglais à succès, Du bout des doigts (Fingersmith dans sa version originale) de Sarah Waters, qu’il retrouve le succès, sans perdre l’esprit provocateur que l’on lui connaît bien.
Dans Du bout des doigts, on se retrouve en 1862 en Angleterre. Le génie de ce qu’à fait Park Chan-Wook avec Mademoiselle est qu’il a transposé l’histoire de Sarah Waters dans une Corée sous le joug du Japon, aux alentours des années 30. Car c’est bien lui qui est au scénario, avec Jung Seo-Kyoung 정서경 (avec qui il a déjà travaillé sur Thirst). Nommé pour gagner la Palme d’Or qu’il se fait volé par Moi Daniel Blake, le film gagne tout de même le Prix Vulcain de l’artiste technicien (désormais Prix CST de l’artiste technicien) pour sa direction artistique.
Park Chan-Wook et ses acteurs.
Le gros point fort de ce film est avant tout son réalisateur. Comme je vous l’ai déjà dit plus haut, Park Chan-Wook a travaillé sur l’adaptation du roman en film et, en plus d’être un réalisateur de talent, il a également réussit avec brio à transposer l’histoire de Sarah Waters dans une autre époque, dans un autre décor. Je n’ai pas lu le roman de Sarah Waters, mais, même sans ça, je trouve que de pouvoir transposer l’univers de l’auteur vers une Histoire que l’on connaît est bien vu !

En regardant les quelques bonus qui se trouve sur le Bluray, on apprend que Chan-Wook a engagé Kim Tae-Ri après un gros casting pour jouer dans son film. Il souhaitait une actrice totalement inconnue du grand public pour jouer le rôle de Sook-Hee, et Tae-Ri avait uniquement une carrière de mannequin, ou des petits rôles dans des courts métrages avant de cartonner dans Mademoiselle. Chan-Wook a aimé son jeu naturel, son envie d’apprendre, et sa facilité à poser des questions pour s’améliorer et à s’adapter. Concernant Kim Min-Hee, il est ravi de ne pas avoir eu à la guider de trop, l’ayant vu particulièrement à l’aise durant tout le tournage. C’était également le cas de Ha Jeong-Woo, pour qui il a une grande admiration. L’acteur jouant l’oncle de Hinako est Choi Jin-Woong. Il a du perdre presque une vingtaine de kilo pour le rôle; car il devait paraître sous-alimenté et plus âgé.

Pour ma part, j’ai trouvé que ce dernier était celui qui surjouait le plus et qui m’a le moins convaincu. Je trouve honorable que l’acteur ait du perdre autant de poids pour le rôle et se soit donné ainsi pour être dans son personnage, et l’ai trouvé peu convaincant dans la première partie du film. Je l’ai préféré dans la dernière scène du film dans laquelle on le voit plutôt qu’au début.
J’ai trouvé les deux jeunes femmes et Ha Jeong-Woo vraiment parfait ! Kim Tae-Ri a cette fraîcheur, et Kim Min-Hee ce visage rond de poupée adorable qui fait qu’on la trouve mignonne dès sa première apparition face caméra. Leur complicité, leurs émotions se reflètent parfaitement à l’écran.

Il est assez impressionnant de voir que le film, qui dure quand même environ 2h30 dans sa version cinéma et presque 3h dans sa version réalisateur, est porté uniquement par ses acteurs, et par quatre personnages. Enfin, presque cinq !
La maison, un personnage à part entière.
Bien qu’elle n’ait pas de nom spécifique, la maison de l’oncle d’Hideko est un personnage à part entière ! La plupart de l’action se passe à l’intérieur des murs de cette grande maison qui a été créé de toute pièce par les décorateurs. Park Chan-Wook aurait pu utiliser des fonds verts ou des effets spéciaux pour faire apparaître les pièces derrière ses personnages mais, pour plus d’authenticité et de naturel, il a préféré utiliser une véritable maison, et reconstruire quelques pièces en studio.
La maison de l’oncle d’Hideko existe donc réellement ! Tout du moins, son extérieur. Il s’agit du Rokkaen, une maison fondée par un architecte anglais qui a formé un bon nombre d’architectes japonais par la suite : Josiah Conder. Le Rokkaen a été construit en 1913 et se compose d’un bâtiment de style européen, d’un autre de style japonais et de plusieurs entrepôts ainsi que d’un grand jardin japonais.

Sexualité et rôles sociaux.
Je vais légèrement spoiler l’intrigue de l’histoire dans ce paragraphe. Si vous ne souhaitez pas savoir ce qu’il se passe dans le film, ne lisez pas ce qui se trouve entre les barres 🙂
Autant vous prévenir, le film contient de nombreuses scènes de sexe homosexuel. Mais, comme j’ai aimé à le lire dans le Dictionnaire du cinéma coréen, par Antoine Coppola:
« Elles sont d’abord dans un rapport classique d’autodépendance de maître à esclave. La maîtresse n’est maîtresse que si existe son esclave, et l’esclave jouit de son aliénation dans son propre renoncement, culminant dans la non-existence. Elles se jouent l’une de l’autre, se croyant chacune plus perverse que l’autre. […] Elles découvrent le plaisir du corps, le dépassement des contingences dans l’extase. […]il ne s’agit pas donc pas d’homosexualité dans le sens commun mais de couple et de relation sexuelle, mais d’une libération et d’une accession à la complétude de l’être androgyne, dédié à l’extase et à l’expérience du corps en dehors des masques logocentriques (ndlr : le logocentrisme est de considérer que sa façon d’utiliser le langage est celle qui doit être la norme) des civilisations, à savoir les rôles sociaux de femmes et d’hommes, de riches et de pauvres. Tous les personnages du film avancent masqués, en ce sens qu’ils ont une double vie ou quelque chose à cacher. »
J’espère que cet article vous a plus et vous a donné envie de voir le film ! Pour ma part, j’avais déjà vu Oldboy mais ne connaissait pas d’autres films de Park Chan-Wook. Je crois bien que je vais me regarder Thirst incessamment sous peu 🙂
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