L’île de Jeju.
La destination de vacances et de lune de miel préférée des coréens. Un endroit que je voulais à tout prix visiter lors de mon voyage en Corée du Sud. Il faut avouer que le cadre paradisiaque, la mer, les roches volcaniques en forme de dragon, ou encore les spécialités culinaires font envie ! Je vous ai déjà parlé de Jeju, ou plutôt d’un de ses héritages en berne, avec les haenyo, ces femmes sirènes merveilleuses qui font un travail de titans pour maintenir l’économie de leur île. Et on peut dire que ça n’a pas été une partie de plaisir quand on connaît l’Histoire de Jeju…
Avant de vous parler de mon week-end là-bas, je voulais d’abord vous faire faire un tour des événements marquants de l’Histoire de Jeju.
De Tamna à Jeju.
A 100km de la Chine, 500km ouest de la mer orientale et à 200km au sud-ouest de la Corée, se trouve l’île de Jeju. En son centre, le mont Halla (한라산 Hallasan en Coréen), un volcan, mesurant 1950m de haut, faisant 500m de diamètre et 80m de profondeur. Dans sa totalité, l’île fait 1826km2 et est divisée en deux, la ville Jeju au sud et Seogwipo 서귀포 au nord. En dehors de certains objets trouvés et datant de la préhistoire ou encore de mythes concernant la création de l’île, il n’existe encore rien d’officiel concernant la création de Jeju. Même si les mythes et légendes de l’île font partie intégrante de son Histoire pour les insulaires, je préfère ici vous faire part de véritables faits et garder les légendes pour un autre article 😉
Avant de s’appeler « Jeju » 제주, l’île à porté de nombreux noms : Dongyeongju, Seopra, Tammora, Takra et Tamna 탐라. Ce dernier a été donné par un roi de Silla. Durant la période des Trois Royaumes (quand la Corée du Sud était divisée en trois : Koguryeo, Silla et Baekje), Tamna a été tours à tours indépendante et sous le joug d’un de ces trois royaumes.

Des recherches archéologiques ont montré que Tamna était en relation étroite avec d’autres pays d’Asie pour des échanges commerciaux. La première mention historique de l’île apparaîtrait dans un écrit chinois datant de la 3ème année de notre ère. Il parlerait de l’île sous le nom « Juho« , ou « l’île des barbares« . Mais, cela est encore discuté par les coréens du nord et du sud, les premiers étant sûrs que Juho ferait référence à une autre île. Cela n’empêche pas les coréens eux-mêmes de considérer les insulaires comme des « sauvages indisciplinés » de la fin de la dynastie Goryeo jusqu’au XXème siècle.
Si l’on en croit le Samguk Sagi 삼국사기 (cette chronique historique qui raconterait les 10 premiers siècle de notre ère), en 476, Tamna aurait été une alliée précieuse pour Baekje et le Japon (militairement parlant). Même après la chute de Baekje suite à l’alliance entre Silla et l’empire Tang, Tamna restait une force marine imposante et une alliance de taille pour le Japon et la Chine.
En 1213, Tamna perd son statut indépendant et est renommé « Jeju », ou « le plus grand village à travers l’océan » sous le roi Gojong.
Jeju, île d’exil et de conflits violents.
Envahie de 1273 jusqu’en 1375 par les Mongols, l’île de Jeju est le dernier gros champ de bataille de cette confrontation. De nombreux guerriers coréens quitte la Corée pour Jeju et combattre l’envahisseur. L’élevage de chevaux Mongols aura un gros impact sur l’économie de Jeju. En effet, la réussite Mongols est due à leurs montures et Jeju fut utilisée par ces derniers : ses terres sont parfaites pour l’élevage de chevaux, en pleines montagnes. Même par la suite, lors de la dynastie Joseon, les insulaires ont conservé ces élevages, non seulement pour leur vie de tous les jours mais aussi pour marchander avec les autres pays d’Asie. On appellera les habitants de Jeju les « nomades de la mer » avant la fermeture de l’île pour deux siècles, de 1623 à 1830.
L’île est intégrée dans l’administration de Joseon en 1413 grâce à son apport en biens exotiques (chevaux donc, mais également des ressources de la mer, des poils de vache ou encore des mandarines). De plus, Jeju devient la forteresse militaire de Joseon et empêche les pirates japonais d’atteindre la côte. Depuis la dynastie Goryeo et également pendant celle de Joseon, l’île de Jeju est utilisée pour exiler les prisonniers de guerre, aussi bien des moines que des voleurs ou encore des personnes de la royauté. Plus de 200 personnes auraient été envoyé en exil sur l’île durant les 500 ans qu’à duré la dynastie Joseon. La fin de cette dynastie voit également une hausse au pouvoir du néoconfucianisme sur l’île, qui prend le dessus sur le bouddhisme; ce qui entraîne une série de révoltes sur Jeju (en 1813, en 1862, en 1893 et en 1901). L’île est à nouveau isolée par la Corée du Sud, son économie stagne et cette isolation est renforcée par l’interdiction des insulaires de se rendre sur le continent avec, en plus, une interdiction de pêcher, qui est la principale source de revenue alimentaire de Jeju…
Jeju n’est pas passé à côté de la violente domination japonaise sur la Corée du Sud, malgré le progrès que cette dernière a apporté (routes, écoles,…). Le varech devient, après 1904, une denrée réclamée par les japonais pour la fabrication de médicaments ou de poudre à canon. Cela offre une belle opportunité aux plongeuses et favorise la transformation de la société de l’île : il y a une émigration massive des insulaires vers le Japon (50 000 personnes sur 200 000 en 1935). A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, il y a plus de soldats japonais sur l’île que de natifs…
Le soulèvement de Jeju, après la pluie le beau temps
Le 3 Avril 1948, les « gauchistes » se révoltent. La population se rebelle contre les élections municipales de la partie méridionale de la péninsule coréenne. Cette manifestation fera 49 morts en deux semaines. La fin du soulèvement a lieu un an plus tard avec un bilan de 30 000 victimes… 160 villages sont dévastés, les habitants sont tués violemment puis déplacés dans des camps de réfugiés. Sur le littoral, le monde extérieur n’est pas tenu au courant de ce qu’il se passe sur l’île, ce qui empêche toute aide humanitaire. Pendant plusieurs années, l’île est ignorée et dépérie… 95% des villages localisés sur le mont Halla ont été détruis, brûlés…
Dans les années 60, l’économie de Jeju change énormément alors que l’île se rétablie. La vente et la collecte du wakame décline à cause du développement sur le continent de la culture artificielle d’algues. Les plongeuses quittent alors leur activité en mer, lui préférant le travail dans les vergers, qui est également plus sûr.
Le tourisme se développe également dès les années 70. En 2010, il représente 70% du revenu de l’île. Depuis, l’économie du tourisme fluctue principalement grâce aux chinois qui visitent l’île en masse et achètent même des terres. Mais cet engouement effraie les insulaires qui ont peur de voir l’île devenir chinoise.
Jeju a réussi à s’ouvrir au monde mais tâtonne encore dans la peur que son passé historique se reproduise…
Sources : Visit Jeju, Wikipedia, Les plongeuses Jamnyo (Haenyo) de Jeju en Corée, fondation culturelle Musée Barbier-Mueller de Park Ok-Kyung.
En collaboration avec Jimmy. Thanks Jimmy 😉
Merci pour cette courte « synthèse » historique .
C’est curieux que cette île au passé tragique attire les jeunes couples surtout pour les lunes de miel.
Merci d’avoir lu cet article !
Je ne savais rien sur l’Histoire de l’île lorsque j’y suis allée, j’en ai appris d’avantage en écrivant mon article sur les sirènes de Jeju… Il est clair que profiter du cadre, du soleil, de la plage ne nous fait pas penser à tout ce qu’il a pu se passer là-bas…